
Les constructeurs automobiles se sont engagés à reculons dans la réduction des émissions de CO2. À l’origine, ils se reposaient sur la sobriété intrinsèque du moteur diesel pour passer sans encombre les différentes normes de l’Union Européenne. Jusqu’à ce que le « dieselgate » provoque, à partir de septembre 2015, une prise de conscience – largement sous la contrainte législative de l’Europe.
Cinq ans après, revoilà ces constructeurs très engagés dans l’électrification. Un changement de paradigme imposé par l’obligation impérieuse de respecter la baisse drastique et à court terme des émissions de CO2 de leurs offres. Les annonces tonitruantes...
Les constructeurs automobiles se sont engagés à reculons dans la réduction des émissions de CO2. À l’origine, ils se reposaient sur la sobriété intrinsèque du moteur diesel pour passer sans encombre les différentes normes de l’Union Européenne. Jusqu’à ce que le « dieselgate » provoque, à partir de septembre 2015, une prise de conscience – largement sous la contrainte législative de l’Europe.
Cinq ans après, revoilà ces constructeurs très engagés dans l’électrification. Un changement de paradigme imposé par l’obligation impérieuse de respecter la baisse drastique et à court terme des émissions de CO2 de leurs offres. Les annonces tonitruantes se succèdent donc depuis le début 2021, affirmant que dès 2025 pour certains, surtout des constructeurs européens, et en tout état de cause en 2030, la bascule sera opérée vers « l’électrification de masse des véhicules ».
Des objectifs à court terme
Ces annonces ne sont qu’une manière de se conformer aux injonctions de l’UE qui a fixé à 95 g/km les émissions moyennes de CO2 des voitures neuves pour 2021, soit une consommation moyenne d’environ 4 l/100 km de carburant essence. Et l’Europe a adopté l’objectif d’une baisse supplémentaire de 37,5 % à horizon 2030, soit une division par deux des émissions depuis 2018 pour atteindre 60 g/km (source : France Stratégie).
En réalité, constructeurs et équipementiers ont peu de latitude pour respecter ces objectifs. Et la seule solution à l’horizon 2030 reste la propulsion électrique avec batteries ou grâce à la pile à combustible (PAC) à hydrogène. Si la crise sanitaire de 2020 a mis en sommeil des développements, tous les constructeurs déjà impliqués redoublent d’efforts en R&D et certains reviennent à la PAC, comme Renault ou Mercedes récemment.
Selon l’Avere (Association nationale pour le développement de la mobilité électrique), les projections de la filière automobile française (PFA, CCFA et France Hydrogène ex-Afhypac) tablent sur une part de marché de près de 64 % de véhicules légers bas carbone en 2030 (hors hybrides non rechargeables), dont 39 % de VEB (véhicules électriques à batteries), 24 % d’hybrides rechargeables PHEV et 1 % de VEH PAC (PAC à hydrogène). Soit un parc de véhicules électrifiés d’environ 7,5 millions d’unités dont 300 000 véhicules à PAC à hydrogène.
LOM et Stratégie nationale bas carbone en France
À brève échéance, la loi d’orientation des mobilités (LOM), tout comme la « Stratégie nationale bas-carbone », permettent à ces acteurs de bénéficier d’une visibilité sur la place visée par l’électromobilité dans le parc de véhicules. L’objectif « final » étant de parvenir en France à 100 % de véhicules électriques neufs en 2040. C’est demain ! Les constructeurs sont donc engagés dans une reconversion majeure de leur offre et on en voit tous les jours les premiers effets avec une électrification à marche forcée en électrique « pur » et en hybride rechargeable.
Volkswagen a ainsi annoncé début 2021 que ses ventes de véhicules électriques d’ici 2030 augmenteront pour atteindre 70 % en Europe et 50 % aux États-Unis et en Chine. L’objectif à long terme : la neutralité carbone d’ici 2050. « Entre aujourd’hui et 2025, nous introduirons un nouveau véhicule électrique chaque année », déclarait il y a peu Thomas Ulbricht, membre du directoire de Volks-wagen et en charge du développement technique. Carlos Tavares, le patron de Stellantis qui regroupe toutes les marques de l’ex-PSA (Citroën, DS, Opel et Peugeot) et de FCA (Fiat, Chrysler, Jeep, Dodge, Alfa Romeo, etc.), prévoit exactement les mêmes parts de marché en 2030 pour l’électrique en Europe. En précisant que les hybrides rechargeables, disponibles pour chaque modèle ou presque en 2025, céderont rapidement la place aux 100 % électriques.
Électrification à marche forcée
Les équipementiers ne s’y sont pas trompés et Valeo a présenté au salon de l’automobile de Shanghai cette année, au travers de sa joint-venture avec Siemens, son premier système complet de propulsion 100 % électrique. Celui-ci développe 100 kW, comprenant le moteur électrique, l’onduleur (le cerveau du système) et le réducteur (l’équivalent de la boîte de vitesses). Le français est déjà un des leaders des alterno-démarreurs de 48 V qui constituent une pièce importante des moteurs thermiques hybrides et hybrides rechargeables. Constat identique pour l’allemand Bosch qui, outre ses systèmes d’hybridation en 48 V, propose aussi un module électrique déclinable en 50 à 300 kW de puissance, pour un couple de 100 à 600 Nm, le tout sur un seul axe de transmission implantable en lieu et place d’un essieu de traction ou de propulsion (ou les deux à la fois).
Chez Renault, le patron récemment arrivé Luca De Meo annonçait son plan le 14 janvier dernier, avec la volonté d’atteindre, grâce à ses solutions électrifiées et à hydrogène, « le panel de produits le plus ʺvertʺ d’Europe d’ici 2025. » Concrètement, quatorze nouveaux modèles seront lancés d’ici cette date (sept électriques et sept dans les segments C et D), avec l’ambition que ces segments supérieurs pèsent 45 % des ventes, toujours d’ici 2025.
La « Révolution » est en cours
Cette phase, baptisée « Rénovation », sera suivie par la phase « Révolution » jusqu’en 2030, qui doit faire basculer le modèle économique du groupe Renault vers la technologie, l’énergie et la mobilité, selon Luca De Meo. La neutralité carbone est prévue pour 2050. Dans ce contexte, Renault a récemment abandonné sa coopération avec le français Symbio pour la fourniture de sa PAC à hydrogène au profit de l’américain Plug Power dans une alliance à 50/50. Plus prosaïquement, c’est aussi parce que Stellantis a rejoint Symbio dont le capital est détenu par Faurecia (ex-PSA) et par Michelin dont la famille Peugeot est actionnaire. Mais Renault se fournira toujours en réservoirs à hydrogène auprès de Faurecia, l’un des rares spécialistes en Europe. L’objectif du losange est d’intégrer dès 2021 dans les catalogues de ses Trafic et Master des modèles emmenés par une PAC à hydrogène.

Véhicules bas carbone : l’hydrogène s’impose
Du côté de Stellantis, Opel est devenu, depuis son intégration dans le groupe, le centre de R&D pour la PAC à hydrogène. Une décision justifiée par l’histoire de l’ancienne filiale européenne de GM dont les recherches dans la PAC étaient assez avancées.
Chez Symbio-Faurecia Michelin Hydrogen Company, la production de près de 200 000 unités de PAC par an est actée pour 2030 et celles-ci équiperont également des VUL puis des VP si le marché décolle. Et l’usine située à Saint-Fons dans la métropole lyonnaise sera la plus importante unité de production de PAC en Europe.
Pour leur part, les Français de Green Corp Konnection (GCK) et FEV viennent de s’allier pour développer leur propre PAC de forte puissance avec 200 kW/272 ch à la clé. Ils s’appuient sur EKPO Fuel Cell Technologies, coentreprise entre Elring Klinger et Plastic Omnium. Dans un premier temps, un véhicule 4×4 participera au Rallye Dakar en 2023, décliné ensuite sur des VUL principalement.

La PAC à la manœuvre
Constructeurs et équipementiers ne veulent pas laisser passer le train de la PAC à hydrogène dont les constructeurs asiatiques se sont emparés depuis longtemps : Honda avec sa Clarity, Toyota avec sa deuxième génération de Mirai, Hyundai avec sa Nexo. D’ailleurs, BMW, allié depuis 2013 à Toyota, a mis en avant à Francfort en 2019 son prototype de X5 iHydrogen Next, doté d’une PAC du japonais. Son lancement est prévu pour la fin 2022 (moteur de 374 ch, PAC de 125 kW/170 ch, réservoirs de 6 kg de H2O sous 700 bars). Pour sa part, Daimler s’est allié avec Volvo Trucks et Iveco pour développer des PAC à hydrogène pour poids lourds dès 2025, mais l’automobile n’est plus une priorité pour sa marque Mercedes. Le GLC Fuel Cell de 2017 a donc été remisé en attendant des jours meilleurs.
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