
Il y a un peu plus d’un an maintenant, ALD Automotive et Arval rejoignaient l’Alliance MAAS : un lobby qui a pour but de promouvoir auprès du Parlement européen les services de mobilité (voir notre article). Une mobilité pas seulement liée à la voiture : on retrouve parmi les membres de cette organisation des fabricants de cycles, des compagnies ferroviaires, des villes ou encore des opérateurs de VTC comme Uber.
Cette adhésion illustre la dynamique dans laquelle se trouvent ces acteurs de la vie des flottes. Si louer des voitures reste leur principale activité, leur panel de services ne cesse de s’élargir pour accompagner les clients dans la...
Il y a un peu plus d’un an maintenant, ALD Automotive et Arval rejoignaient l’Alliance MAAS : un lobby qui a pour but de promouvoir auprès du Parlement européen les services de mobilité (voir notre article). Une mobilité pas seulement liée à la voiture : on retrouve parmi les membres de cette organisation des fabricants de cycles, des compagnies ferroviaires, des villes ou encore des opérateurs de VTC comme Uber.
Cette adhésion illustre la dynamique dans laquelle se trouvent ces acteurs de la vie des flottes. Si louer des voitures reste leur principale activité, leur panel de services ne cesse de s’élargir pour accompagner les clients dans la réflexion sur la mobilité. Avec des conseils sur la transition énergétique des flottes, la mise en place de services d’autopartage ou de vélopartage, voire en explorant les possibilités liées aux véhicules autonomes.
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LOM, CAFE et WLTP
Autant de propositions qui correspondent à une demande de la part des grandes entreprises ou de collectivités soucieuses d’alléger leur bilan carbone, de rationaliser leur flotte et de repenser leur mobilité. Ces services répondent aussi à l’évolution du cadre réglementaire. La loi d’orientation des mobilités (LOM), la réglementation CAFE et le WLTP ont entraîné un basculement dans les flottes et la crise sanitaire va aussi avoir des impacts. Ce qui ne peut que contribuer à promouvoir une mobilité électrique et vertueuse avec une baisse des taux de CO2.
Dans ce contexte, un service s’impose dans le catalogue des loueurs : la location qui marie dans le même contrat de petits véhicules électriques avec la possibilité de faire appel à des véhicules thermiques de plus grande capacité pour les déplacements pendant les week-ends ou les vacances. Baptisé Switch chez ALD, ce service existe chez Arval en location moyenne durée sous le nom d’e-FLEX ou de Flex2Use chez Athlon (voir l’encadré en fin d’article).
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Au sein de la Holding Bouygues Construction, cette solution de mobilité a été testée dès 2017 et peu après proposée à l’ensemble des salariés éligibles à la voiture de fonction. Les salariés peuvent alors garder un petit véhicule de fonction ou bien y renoncer totalement. Le prestataire Ubeequo gère ce crédit mobilité que les salariés peuvent aussi bien employer en location de voitures qu’en billets de train ou d’avion ou en services de covoiturage.
Véhicules de fonction : allier électrique et thermique
Pour ceux qui choisissent de garder un petit véhicule de fonction, Bouygues Construction offre une Zoé ou une e-208. « Cette solution est retenue par les salariés qui effectuent uniquement le trajet domicile-travail. Étant souvent seuls, ils n’ont pas forcément besoin d’une grande voiture », explique Vincent Nicot, le DRH de la holding. Autre public pour ce type de solution, les salariés attachés au prestige de la marque de leur véhicule. Depuis 2016, la car policy de l’entreprise se compose uniquement de modèles français. Des salariés mettent donc à profit leur crédit mobilité pour s’installer le temps d’un week-end au volant de voitures de plus grosses cylindrées et de marques étrangères.
Aujourd’hui chez Bouygues Construction, ils ne sont que seize salariés à avoir opté pour cette solution du renoncement partiel à la voiture de fonction contre 90 qui ont choisi le renoncement total. Une faible proportion que Vincent Nicot justifie notamment par le choix d’abord limité du véhicule électrique, la Zoé. L’arrivée récente de l’e-208 pourrait contribuer au succès de la formule. À noter que la flotte de Bouygues Construction comprend 9 000 véhicules dont 5 000 voitures de fonction.
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Une entreprise comme la filiale R&D de l’éditeur allemand de logiciels SAP s’est aussi tournée vers ce type de solution combinant véhicules électriques et thermiques, avant d’y renoncer. Mais chez SAP Labs France, c’est en interne qu’a été développé le dispositif il y a cinq ans. À cette époque, SAP lançait une politique volontaire d’intégration de véhicules électriques. Pour les salariés qui optent pour l’électrique, la participation aux frais se limite à 1 euro symbolique et le montant de l’avantage en nature varie de 130 à 190 euros suivant les modèles : Zoé, e-Golf ou Leaf. Un coût moins élevé que l’équivalent pour des véhicules thermiques, note Benoît Duval, le gestionnaire de la flotte.
SAP à la manœuvre
« Au départ, nous avons intégré des Zoé 21 kW dont nous savions que les conducteurs ne pourraient pas les utiliser pour partir en vacances. Nous leur avons proposé pour ces trajets des véhicules de service dont nous disposions en interne ou des locations ponctuelles », précise Benoît Duval. Pour ces autres trajets, l’entreprise se tourne le plus souvent vers le Touran de Volkswagen, complète le gestionnaire : « une voiture familiale de sept places qui répond à toutes les attentes pour les bagages ou le nombre de personnes ».
Depuis 2019 pourtant, ce dispositif est progressivement abandonné. Non que l’entreprise ait renoncé aux véhicules électriques, bien au contraire. « Mais depuis 2019, toutes les voitures électriques que les collaborateurs commandent doivent avoir une batterie minimum de 60 kW », reprend Benoît Duval. Et avec l’intégration dans la flotte des Kia e-Niro ou des Hyundai Kona Electric aux autonomies beaucoup plus élevées, soit de l’ordre de 500 km sur les routes secondaires ou de 300 km sur l’autoroute selon ce responsable, le recours à des véhicules thermiques complémentaires n’est plus nécessaire.
Économiquement, l’intégration dans la car policy de ces véhicules aux autonomies plus importantes est aussi avantageuse pour l’entreprise. Son soutien aux véhicules électriques avait logiquement débouché sur une augmentation de leur nombre dans le parc de 270 véhicules actuellement : de cinq Zoé en 2015, la proportion avait atteint 50 % de la flotte en 2017, soit environ 130 véhicules. « Nous nous sommes retrouvés avec des montants importants de location, se rappelle le responsable. Et surtout qui n’étaient pas prévisibles : en juillet et août, les locations explosaient. »
De plus, depuis la mise en place de la solution combinée en 2015, le marché de l’électrique a évolué : « Désormais, avec les remises obtenues sur les voitures et la hausse des valeurs résiduelles, les véhicules électriques sont intéressants. Nous obtenons des loyers d’environ 500 euros en moyenne. Comparativement, le loyer d’une Zoé d’environ 350 euros, auquel il fallait rajouter régulièrement une location pour les vacances, nous revenait plus cher au final », constate Benoît Duval (voir aussi le témoignage).
Le retour aux véhicules de fonction
Dans le parc de SAP Labs France restent donc quelques Leaf 40 kW et des Zoé. Mais elles seront remplacées au terme de leur contrat de trois et cinq ans. L’avantage économique de cette nouvelle formule est aussi de permettre à l’entreprise de faire l’économie du parc de véhicules de service. Et dans la nouvelle car policy, seules quelques voitures de petit format perdurent : « Nous proposons des dérogations pour ceux, parisiens ou autres, qui souhaitent une voiture plus petite comme des Smart électriques », pousuit Benoît Duval. Le choix de ce type de voiture n’est complété ni par une voiture plus grande, ni par un système de crédit mobilité. « Nous offrons la possibilité de véhicules électriques à grande autonomie qui restent maniables dans l’environnement parisien et nous ne voulons pas complexifier notre car policy avec des offres plus différenciées », justifie le responsable.
Des forfaits en réflexion
Côté crédit mobilité, SAP Labs France réfléchit plutôt aux solutions de « forfaits » mises en avant dans le cadre de la LOM. « Nous sommes en train d’en discuter en interne pour voir comment nous pouvons amener les salariés à recourir plus souvent à des solutions comme le vélo électrique », note Benoît Duval, même s’il anticipe un succès mitigé en raison du relief qui entoure le siège de Mougins (06). Mais le succès pourrait être au rendez-vous pour les bureaux parisiens de l’entreprise alors que le nombre de prestataires de « vélo de fonction » se multiplient (voir aussi l’article).
Au sein de la Holding Bouygues Construction, le crédit mobilité, qui se substitue totalement au véhicule, s’est en revanche imposé dans la durée. « Les salariés réfléchissent bien avant d’intégrer le système et il y a maintenant suffisamment de personnes qui y ont adhéré pour pouvoir se renseigner en interne. Et une fois la formule choisie, rares sont ceux qui la quittent », souligne Vincent Nicot.
Certains le font pour des raisons liées à des évolutions professionnelles en interne : pour un départ en province ou un changement de fonction qui entraîne un changement d’organisation personnelle. Ils peuvent aussi renoncer à ce dispositif pour une raison personnelle quand il y a un changement de la composition familiale. « Avec la situation post-confinement peut-être serons-nous plus confrontés à ce type de situation », note ce DRH. Et Vincent Nicot anticipe la poursuite du développement de ce système « en dépit d’une inertie : on ne peut entrer dans le crédit mobilité qu’à la période du renouvellement du véhicule et les contrats durent trois à quatre ans. »
Chez Ubeeqo qui gère ce dispositif, on confirme que la formule de substitution totale du crédit mobilité à la voiture de fonction est vouée à gagner du terrain. « Lorsqu’ils choisissent le crédit mobilité, les collaborateurs l’emploient prioritairement pour prendre le train, les transports publics et les taxis », illustre Mathilde Gady, directrice marketing de ce prestataire.
Plus de crédit mobilité ?
Le succès de cette solution tient à plusieurs raisons. « Les aspects pratiques ont évolué, comme la saisie des notes de frais devenue numérique et qui rend plus simple l’utilisation du crédit mobilité », avance Vincent Nicot. En rappelant que la population qui adhère au dispositif comprend majoritairement « de jeunes urbains, plutôt parisiens, de moins de 35 ans ». Autre motivation pour renoncer totalement à la voiture de fonction : les salariés possèdent déjà souvent un véhicule familial, relève ce DRH. « D’autres, plus jeunes et vivant en métropole, préfèrent consacrer leur crédit mobilité aux trajets des week-ends et des vacances. Enfin, il y a ceux pour qui les frais de stationnement en ville sont trop coûteux », ajoute-t-il.
Le déploiement du télétravail suite à la crise sanitaire pourrait aussi contribuer à orienter les conducteurs vers ce dispositif : avec moins de déplacements nécessaires sur le site de l’entreprise, l’utilité d’un véhicule de fonction est moindre. « Nous n’avons pas encore mesuré bien des impacts possibles de la période », pointe Vincent Nicot. En soulignant toutefois que pour son entreprise, « le télétravail n’est pas dans les gènes. Il y aura toujours besoin de venir au bureau. »
Et le télétravail ?
Chez Ubeeqo à l’opposé, on anticipe que la dynamique autour du télétravail va contribuer à accroître le recours aux solutions de crédit mobilité, en substitution partielle ou totale à la voiture de fonction. « Depuis le 1er janvier 2020, le nombre d’utilisateurs du crédit mobilité parmi nos clients a doublé, passant de 500 à plus de 1 000 aujourd’hui. Et nous avons un nombre croissant de demandes de renseignements. Nous nous attendons donc à une progression importante dès la rentrée », projette Mathilde Gady.
Dossier - Véhicules de fonction : moins de véhicules, plus de fonctions
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