
« L’évaluation des VR des véhicules est l’exercice le plus délicat qui puisse exister. » Cette affirmation de Bernard Durand, directeur général France du spécialiste du remarketing VO Macadam, pose d’emblée la difficulté à appréhender cette notion.
« On met plusieurs choses dans la VR, souligne Xavier Diry, directeur France de Dekra Automotive Solutions, spécialiste de la gestion des restitutions et du remarketing VO. Pour les loueurs longue durée, il s’agit de la valeur à terme du véhicule dans le contrat de location, tandis que d’autres la considèrent comme la valeur réelle d’un véhicule à une date donnée. Les deux sont rarement parfaitement...
« L’évaluation des VR des véhicules est l’exercice le plus délicat qui puisse exister. » Cette affirmation de Bernard Durand, directeur général France du spécialiste du remarketing VO Macadam, pose d’emblée la difficulté à appréhender cette notion.
« On met plusieurs choses dans la VR, souligne Xavier Diry, directeur France de Dekra Automotive Solutions, spécialiste de la gestion des restitutions et du remarketing VO. Pour les loueurs longue durée, il s’agit de la valeur à terme du véhicule dans le contrat de location, tandis que d’autres la considèrent comme la valeur réelle d’un véhicule à une date donnée. Les deux sont rarement parfaitement égales, sauf coup de chance ou instrument d’évaluation ultra performant. » Cette définition évolue aussi avec le véhicule lui-même puisque la VR se veut une valeur économique prévisionnelle, touchée par un grand nombre d’éléments et qui peut ou va se modifier tout au long du contrat. Et de cette VR dépendra au final la valeur de revente.
Une valeur résiduelle difficile à définir et à fixer
Le calcul de la VR est d’autant plus complexe qu’un grand nombre de facteurs peuvent la faire évoluer : indices de croissance des véhicules en question, évolution des prix catalogue, démocratisation des options, quantités de véhicules mis à la route, impact des dommages subis par les voitures durant la durée de la location, ratio de durée de vie du véhicule/kilométrage – sans compter les aléas règlementaires (fiscaux notamment) et internationaux. Sur ce dernier point, la fermeture brutale du marché algérien en 2005 a durablement traumatisé le monde du VO. Cet évènement déjà lointain n’est pas seulement un souvenir marquant pour les acteurs du VO, il a été à l’origine d’une professionnalisation croissante de l’ensemble de la chaîne, avec à la clé une évaluation beaucoup plus fine des VR.
L’informatique et internet ont aussi facilité la création d’outils performants et la crise de 2008 a précipité le mouvement. Une évolution d’autant plus importante pour les loueurs longue durée qui prennent en charge le risque financier d’une éventuelle mauvaise évaluation de la VR. La sanction se veut alors sans appel : les véhicules se vendent à des prix plus bas qu’estimés. Assumant ce risque financier, les loueurs ont beaucoup investi dans des outils statistiques et mathématiques complexes, destinés à maîtriser au mieux les VR. Chaque loueur possède son propre outil, conforme à sa stratégie VO, qui diffère sensiblement d’un acteur à l’autre selon les canaux de revente visés.
Des comités experts pour les VO et les VR « Depuis huit ans, nous employons un système qui modélise une vingtaine de variables et nous conduit à revoir les VR tous les trois à six mois, explique Pascale Blazy, directrice du risque chez LeasePlan. Un comité d’experts du VO et des VR étudie la mise sur le marché de tel ou tel modèle dans un volume donné, avec l’idée de ne pas en mettre trop le cas échéant pour ne pas nuire à sa valeur. » L’équation est connue : trop de véhicules d’un modèle en circulation par rapport à la demande en réduit l’attractivité et donc la VR. Mais cette équation est parfois difficile à poser : la rareté par exemple ne signifie pas automatiquement une VR élevé pour un modèle « exotique » et mal distribué. La cote évolue donc sans cesse et chacun a ses idées vis-à-vis des marques françaises, allemandes, etc. Et dans ce domaine, rien n’est figé : assez mal valorisées autrefois, les marques coréennes se vendent de mieux en mieux et voient leur cote augmenter, pointe Bernard Durand, pour Macadam.
Chez Athlon Car Lease, un comité stratégique VR se réunit pareillement, composé de la direction générale, du directeur commercial et de commerciaux, du directeur VO et d’analystes experts des VR. Il détermine les VR dites stratégiques et qui vont servir à établir un « pricing », cela tous les mois, à un raison d’un segment par mois, pour couvrir l’ensemble des segments sur un semestre.
Des outils mathématiques et statistiques
Pour autant, la VR ne doit pas devenir une valeur commerciale en soi, avertit Vincent Wocjiekowski, directeur VO d’Athlon Car Lease. « Il y a bien sûr un impact commercial de toutes les décisions de pricing, Pour nous loueurs, la complexité reste d’ajuster au plus juste les VR en tenant compte du risque et du business. Aussi nous veillons à ne pas appliquer tout de suite les décisions relatives à la VR et nous planifions un calendrier de ces évolutions pour ne pas surprendre nos clients », souligne-t-il. Si les modèles statistiques et mathématiques des loueurs ne sont pas infaillibles, ils semblent cohérents. « Les analyses statistiques des ventes du marché constituent une base très solide pour prévoir les VR, mais d’autres éléments doivent être pris en compte », admet Agnès van de Walle, directrice remarketing d’Arval France. Spécifiquement quand de nouveaux modèles sont mis sur le marché. « Les constructeurs ont de fait accéléré le renouvellement de leurs gammes, avec une actualité produits forte », précise-t-elle. Sans historique, les loueurs ne sont pas démunis vis-à-vis des véhicules neufs. « Nous avons différents éléments à notre disposition, des éléments de valeur marché liés à la marque, au segment, à la loi de roulage, aux finitions, etc. Ils permettent d’apprécier au plus juste la VR de chaque VN », poursuit Agnès van de Walle.
Outre leurs bases statistiques, les loueurs s’appuient sur des outils de benchmarking ou de calcul des valeurs futures comme Prévar (Argus) et Forecast Web (Autovista). « Des données sur la VR sont fournies par des loueurs à des sociétés spécialisées comme Experteye qui restituent un positionnement des VR sur un panier de véhicules, évoque Vincent Wojciechowski. Ces données viennent enrichir l’évaluation de notre positionnement. »
Une fois la VR de chaque véhicule fixée en début de contrat de location et optimisée selon les besoins du loueur, les gestionnaires de flotte entrent en scène. Car la VR s’impose comme le poste le plus important du loyer mensuel qu’ils devront acquitter, plus de 50 % selon Bertrand Durand, de Macadam. D’où la nécessité pour ces gestionnaires de se préoccuper aussi de la VR de leurs véhicules, et de l’optimiser dans leur intérêt.
Les gestionnaires de flotte se mettent à la VR
Les responsables de parc doivent-ils être au fait de cette problématique complexe pour négocier ? Les loueurs constatent en tout cas, au sein des plus grandes flottes, une « demande systématique de la VR, note Vincent Wocjiekowski, d’Athlon Car Lease. Compte tenu de l’impact financier de la gestion de flotte, certains responsables sont devenus très bons dans la cotation des véhicules. »
Mais cette compétence n’est pas facile à acquérir. « Nous cherchons donc avant tout à bénéficier du meilleur loyer possible en mettant en concurrence différents loueurs. Nous leur demandons des grilles de fluidité pour connaître le loyer en fonction des modifications du contrat pendant sa durée », rappelle Boyan Pechev, responsable de la flotte de 2 900 véhicules de Würth France, spécialiste de la fixation industrielle. « Les clients regardent les loyers dans leur globalité, fait remarquer Olivier Suhas, directeur VO de LeasePlan, et notamment ceux qui nous demandent de travailler sur le TCO. Une partie importante des loyers dépend des bons choix de véhicules, de la bonne loi de roulage, de la bonne motorisation, etc. » Ce qui conduit parfois les plus grandes flottes à négocier en direct avec les constructeurs pour avoir la main sur les modèles et les marques des véhicules, avec des remises à la clé.
Flottes automobiles : le mix en question
La composition de la flotte louée, « le mix » disent les spécialistes, reste de fait un élément clé de l’optimisation des VR. « Notre objectif est de conseiller le client sur des véhicules qui se tiennent bien, résume Pascale Blazy, pour Lease- Plan. Un bon équipement signifie ainsi une VR plus élevée et donc un loyer plus bas. » Mais encore faut-il que cela corresponde aux besoins du client. Et c’est là que la négociation a toute son importante.
« Nous partons du besoin du locataire et nous allons pousser plusieurs alternatives afin d’optimiser les VR. Si le client demande une cotation sur des monospaces 5 places, nous allons l’effectuer. Mais nous allons aussi proposer des monospaces 7 places vers lesquels les particuliers se dirigent nettement en ce moment sur le marché VO », illustre Agnès van de Walle, pour Arval France. Par ailleurs, obtenir des remises directes des constructeurs n’impacte pas directement la VR des véhicules loués, mais plutôt les valeurs d’achat et donc le loyer global. Ce qui oblige le loueur à ajuster ses tarifs.
Plus globalement, les responsables de flotte qui demandent à leur(s) prestataire(s) de gérer au mieux le TCO de leurs véhicules doivent garder un oeil sur la VR car son optimisation peut influer sur cette donnée. Les prestataires préfèrent parler de conseil pour tout ce qui concerne ces négociations autour du mix des flottes, et nul doute que loueurs et clients trouvent un terrain d’entente. Mais cela n’efface pas le caractère stratégique de l’enjeu pour les uns et les autres.
En ligne de mire, l’optimisation du TCO
Avec les VR, l’entretien des véhicules demeure une difficulté pour les gestionnaires de flotte qui doivent faire en sorte que les frais de restitution en fin de contrat soient les plus bas possibles. En effet, l’état dans lequel sont rendus les véhicules joue sur la VR. « Un véhicule avec une valeur de rachat à l’occasion de 10 000 euros, mais qui nécessite des frais de remise en état de 1 000 euros, n’en vaut plus que 9 000 », synthétise Bertrand Durand, de Macadam. « Il y a une dizaine d’années, il y avait peu de tensions sur les loyers et les loueurs absorbaient aisément les frais de remise en état », se souvient Xavier Diry, pour Dekra. Les choses ont changé depuis et le sujet s’est « professionnalisé » avec la spécialisation d’acteurs, à l’instar de Dekra Automotive Solutions ou de Macadam. Ces derniers interviennent pour arbitrer le sujet des frais de remise en état, entre autres par le biais d’une description exhaustive de l’état du véhicule, « selon des normes communes à tous les inspecteurs », souligne Bertrand Durand.
Entretien et restitution, des dossiers épineux
Les frais de remise en état se sont donc accrus au fil du temps, même en cas d’entretien satisfaisant, et s’élèvent en moyenne à 500 euros par véhicule, selon Xavier Diry, ce qui peut déconcerter plus d’un gestionnaire de flotte. Et un véhicule en mauvais état peut générer jusqu’à 2 000 ou 3 000 euros de frais. D’où la nécessité d’expliquer au mieux la démarche du loueur.
« Nous transmettons aux gestionnaires un document qui décrit minutieusement le processus et le détail de l’expertise pour qu’ils comprennent ce qui est acceptable ou pas, selon des standards établis par le Syndicat national des loueurs de voitures en longue durée (SNLVLD), évoque Pascale Blazy, de LeasePlan. Il faut aussi leur faire comprendre la différence entre usure normale et usure prématurée, et leur montrer l’état du véhicule par une expertise extérieure », ajoute-t-elle. Ce qui renvoie les responsables de parc à deux de leurs principales préoccupations : l’entretien et la restitution. La boucle est bouclée.
Véhicules d’occasion - Optimiser la VR, un jeu stratégique
- Véhicules d’occasion – Optimiser la VR, un jeu stratégique
- Revendre à l’export, c’est gérer les risques
- Ecowash Mobile optimise ses VR
- Rapprocher VR et prix de revente
- Témoignage – José Canena, L’Oréal – Cosmétique Active France
- La VR est surtout liée aux constructeurs