
La production embarquée d’électricité à partir d’hydrogène sous pression et d’une pile à combustible (PAC) n’a rien de nouveau. Les modules lunaires Apollo en étaient déjà pourvus ! Son application dans l’automobile est tout aussi ancienne, pour les véhicules particuliers comme pour les utilitaires. Mais sa commercialisation demeure toujours assez limitée, tout comme le réseau de distribution d’hydrogène avec à peine 42 stations en France aujourd’hui, privées et publiques. Certains constructeurs ont d’ailleurs renoncé, plus ou moins temporairement, à développer ou commercialiser des modèles hydrogène. C’est le cas de Mercedes dont nous avions...
La production embarquée d’électricité à partir d’hydrogène sous pression et d’une pile à combustible (PAC) n’a rien de nouveau. Les modules lunaires Apollo en étaient déjà pourvus ! Son application dans l’automobile est tout aussi ancienne, pour les véhicules particuliers comme pour les utilitaires. Mais sa commercialisation demeure toujours assez limitée, tout comme le réseau de distribution d’hydrogène avec à peine 42 stations en France aujourd’hui, privées et publiques. Certains constructeurs ont d’ailleurs renoncé, plus ou moins temporairement, à développer ou commercialiser des modèles hydrogène. C’est le cas de Mercedes dont nous avions essayé, il y a quelques années, un GLC à PAC parfaitement opérationnel.
Véhicules particuliers : une offre restreinte
Avec les VP, l’offre de modèles hydrogène tend donc à se restreindre, et le japonais Toyota conserve, de très loin, sa prédominance sur ce marché.
Depuis 2021, Toyota commercialise en effet la seconde génération de sa Mirai. Cette grande berline de 4,97 m de longueur fonctionne grâce à sa PAC à hydrogène, qui alimente en électricité un moteur électrique de 182 ch (154 ch pour la première génération). Une batterie lithium-ion sert de stockage « tampon », avec une tension portée à 310,8 V contre 244,8 V précédemment.
La Mirai, encore et toujours…
Avec cette dernière génération de la Mirai, la PAC fonctionne plus silencieusement et sa réactivité à la demande de puissance se fait plus rapide. Ce qui est également dû à sa densité énergétique qui passe de 3,1 kW par litre d’hydrogène à un excellent rapport de 4,4 kW/l. Et le convertisseur en courant continu se fait plus compact, plus léger et plus « réactif », selon Toyota.
Côté consommation, cette Mirai affiche 0,89 kg/100 km en mixte WLTP, soit 650 km d’autonomie grâce aux réservoirs de 5,6 kg d’hydrogène. Lors de nos essais, notre consommation mixte réelle atteignait plutôt 1,3 kg d’hydrogène/100 km, soit 450 km d’autonomie environ. Toyota décline cette Mirai en deux finitions : Lounge à 72 250 euros TTC et Executive à 79 250 euros TTC. Notez que la Mirai du lancement « millésime 2021 » est toujours en vente sur stock à 71 500 euros TTC pour la première et 78 500 euros TTC pour la seconde.
À noter qu’au Royaume-Uni, Toyota travaille à développer un futur pick-up Hilux sur la base de la PAC à hydrogène de la Mirai et avec trois réservoirs sous le plancher. Les premiers exemplaires doivent être présentés cette année.
Mais Toyota ne met pas tous ses œufs dans le même panier et une autre piste d’utilisation de l’hydrogène est à l’étude : non pas pour produire de l’électricité grâce à une PAC, mais tout simplement comme carburant dans un moteur à combustion classique. Ainsi, un SUV compact Corolla Cross H2 Concept sillonne les routes japonaises pour valider ce principe. Il hérite du 3-cyl. 1.6 turbo et à injection directe d’hydrogène gazeux, venu de la sportive de rallye Yaris GR H2. Ce moteur carburant à l’hydrogène a été d’abord expérimenté en 2021 sous le capot d’une Corolla. Le gaz est stocké dans un réservoir sous pression à 700 bars, venu pour sa part de la Mirai. Toyota précise que près de 40 % du chemin a été parcouru pour valider une commercialisation de cette Corolla Cross H2 Concept, ce qui pourrait survenir dès la fin de cette décennie.
On retrouve cette technologie d’hydrogène carburant pour le 5.0 V8 turbo-essence des coupés Lexus LC et RC F, dont la mise au point est assurée par le spécialiste japonais des quads et motos sportives Yamaha. La puissance de ce moteur atteint théoriquement 450 ch et son couple 540 Nm. Reste à connaître sa consommation d’hydrogène carburant et sa date de commercialisation.

… suivie par le Nexo
Le seul véritable concurrent de la Mirai en France demeure le Hyundai Nexo de seconde génération, lancé en 2018. Ce SUV compact de 4,67 m de longueur est emmené par un moteur électrique de 163 ch et 395 Nm, alimenté par une PAC à hydrogène de 127 ch et une batterie lithium-ion d’une puissance de 54 ch (pas de capacité en kWh communiquée). Trois réservoirs cumulent 6,33 kg d’hydrogène, soit une autonomie de 666 km et une consommation mixte WLTP de 0,95 kg/km. Le prix de ce Nexo : 80 600 euros TTC, en hausse de 700 euros par rapport à 2022. Hyundai annonce qu’en 2030, le prix d’une voiture à PAC à hydrogène sera équivalent à celui d’une voiture électrique à batterie. D’ici là, une nouvelle génération de PAC doit être lancée en 2023, qui développerait 136 ch et 270 ch, et dont le prix serait réduit de moitié, l’encombrement d’un tiers, pour une puissance restituée doublée. Notez par ailleurs que d’ici 2030, Hyundai développera, à partir de cette seconde génération de PAC, un utilitaire léger de 5 à 7 m de longueur.
Si le futur de l’hydrogène pour un FCEV (Fuel Cell Electric Vehicle) semble balisé pour le constructeur coréen, il en va différemment pour Honda. Qui a en effet arrêté la commercialisation de sa Clarity (4,91 m de longueur), lancée en 2017 au Japon, aux États-Unis et en Europe du Nord. Les ventes trop faibles de cette berline classique, soit moins de 2 000 unités par an, ont eu raison de sa fabrication.

BMW à la manœuvre
Pour sa part, BMW poursuit, depuis l’hiver 2021, les tests de son grand iX5 Hydrogen à PAC à hydrogène, produit à une cinquantaine d’exemplaires. Le constructeur reste calé sur la validation de la technologie avec une centaine d’exemplaires sur les routes ouvertes d’ici 2025. Date à laquelle la prochaine plate-forme Neue Klasse pourrait éventuellement accueillir cette PAC « fuel cell » développée à l’origine avec Toyota. Les PAC individuelles proviennent ainsi de Toyota, tandis que leur empilement et le système d’entraînement complet demeurent des développements originaux de BMW, sur la base des récents iX et i4 électriques. On retrouve donc la PAC de la Mirai, qui développe ici 125 kW/170 ch en continu ; mais BMW y ajoute un second moteur sur le train arrière, avec donc une puissance totale qui ressort à 401 ch en crête. Une puissance soutenue par une batterie tampon de 231 ch dont la capacité n’est pas communiquée. Mais les réservoirs sous 700 bars emportent 6 kg d’hydrogène et devraient assurer une autonomie de 504 km, soit une consommation de 1,19 kg/100 km.
Il faut aussi évoquer Land Rover qui annonçait mi-2021 la fabrication d’un Defender 110 électrique équipé d’une PAC et d’une batterie tampon. Ce Defender FCEV, dont les prototypes roulent depuis peu, devrait aboutir en 2026 à une gamme de nouveaux modèles entièrement électriques. Mais depuis, Land Rover n’a plus communiqué sur le sujet.

Des interrogations
Interrogations semblables pour Renault dont la filiale Hyvia, spécialisée dans la PAC à hydrogène pour les utilitaires (voir ci-dessous), pourrait équiper la plate-forme CMF-EV des Mégane et Scénic avec cette technologie H2-Tech. Cette PAC H2 développe une puissance de 30 kW/40 ch, qui recharge une batterie de 33 kWh, qui alimente un moteur électrique de 56 kW/77 ch. Pour le Master H2, les 3 kg d’hydrogène sous pression à 700 bars assurent une autonomie de 250 km. Il faudrait donc pouvoir embarquer le double de H2 sous pression pour obtenir une autonomie acceptable pour le grand public.
En revanche, on sait depuis peu que le constructeur indépendant Hopium est en faillite et que son projet de grande berline Machina à PAC à hydrogène risque de ne jamais voir le jour. Pourtant, un millier de clients s’étaient manifestés en versant 410 euros pour la réserver, avec une estimation de prix de 120 000 euros pour l’acquérir. La puissance annoncée était de 500 ch à partir d’une PAC dont on ne connaît pas le fabricant. Mais Hopium avait conclu un partenariat avec Plastic Omnium pour les deux réservoirs d’hydrogène en forme de T sous le châssis, qui emportaient 6 kg d’hydrogène sous 700 bars. Le constructeur annonçait alors une autonomie de 1 000 km et une vitesse maximale de 230 km/h.
Véhicules utilitaires : une offre élargie
Pour l’hydrogène, les avancées se font les plus notables du côté des utilitaires, avec Renault, la triplette Citroën-Opel-Peugeot, ainsi qu’Iveco et Ford.
Renault commercialise depuis début 2023 son Master Van H2-Tech assemblé par sa filiale PVI à Gretz-Armainvilliers (51), à partir du Master E-Tech électrique standard. Ce Master, fabriqué dans l’usine de Batilly (54), affiche un volume utile de 12 m3 et une charge utile de 1 t. Pour sa part, la pile à combustible est développée et produite par la coentreprise Hyvia sur le site de la Refactory de Renault Flins (78). Cette PAC fournit une puissance de 30 kW/40 ch, qui recharge une batterie de 33 kWh, batterie qui alimente un moteur électrique de 57 kW/77 ch et 225 Nm. Un « vrai » FCEV dont on connaît par conséquent la capacité de stockage et la puissance à un instant « t » de la batterie.

Le Master en H2
Pour ce Master, quatre réservoirs d’hydrogène de 1,5 kg à 700 bars, soit 6,0 kg au total, assurent 300 km d’autonomie en cycle mixte WLTP et jusqu’à 400 km en City WLTP. Il faut y ajouter les 100 km d’autonomie de la batterie électrique de 33 kWh, si celle-ci a bien été rechargée (6 heures, chargeur AC en 7 kW). Les premiers clients « partenaires » sont Chronopost, Engie, Orange, Equans et Airbus en France. Aucun prix public n’est communiqué.
Une carrosserie City Bus de ce Master H2-Tech, pour transporter jusqu’à quinze passagers, a été lancée en juin dernier. Avec un seul réservoir, placé sur le toit, de 4,5 kg d’hydrogène sous 350 bars, l’autonomie atteint alors 200 km ; s’y ajouteront les 100 km de la batterie de 33 kWh, soit, au total, 300 km d’autonomie avec la batterie chargée. Les premiers clients « pilotes » sont la RATP Dev, Milla, BE Green et Stroomlijn (Pays-Bas).
Enfin, un Master Châssis Cab H2-Tech doit être commercialisé fin 2023. Équipé de deux réservoirs de 3 kg d’hydrogène au total, placés au-dessus du châssis-échelle, ce Master devrait offrir 250 km d’autonomie en fonction de la transformation carrosserie (benne, frigo, grand volume), plus les 100 km de la batterie de 33 kWh.
Chez Stellantis, l’expertise en matière de PAC ne date pas d’hier : Opel l’a développée depuis les années 90 pour son propriétaire d’alors, General Motors. Passé depuis dans le giron du groupe franco-italo-américain, le centre de R&D d’Opel, situé à Rüsselsheim en Allemagne, est donc devenu le chef de file de cette technologie pour toute la galaxie Stellantis.
On retrouve donc naturellement Opel avec son Vivaro-e Hydrogen, Citroën avec son ë-Jumpy Hydrogen et Peugeot avec e-Expert Hydrogen, tous trois issus du même moule. Il est probable que Fiat en bénéficie pour son Scudo, voire Toyota pour son Proace. Ces camionnettes sont dorénavant transformées à l’usine Sevelnord d’Hordain (Nord) à partir des versions électriques standards qui y sont assemblées sur la plate-forme EMP2. Les capacités de chargement restent préservées : fourgon normal à 5,3 m3, long à 6 m3, charge utile et poids tractable de 1 t.

La gamme Stellantis
Placés dans le châssis sous le plancher arrière, trois réservoirs d’hydrogène de 4,4 kg sous 700 bars alimentent une PAC de 45 kW/60 ch. Cette PAC est fournie par la co-entreprise Symbio à Vénissieux (69), qui appartient à Michelin. Tout comme pour Renault, la PAC de 45 kW/60 ch alimente une batterie « tampon » lithium-ion de 10,5 kWh ; le tout développe 90 kW/120 ch lorsque la PAC et la batterie fournissent de concert leur énergie électrique. Le moteur électrique affiche pour sa part une puissance de 100 kW/133 ch et 260 Nm. Il s’agit donc bien d’un FCEV, avec une autonomie de 50 km sur cette seule petite batterie, si elle est rechargée (11 kW en AC). Pour leur part, les réservoirs d’hydrogène assurent 350 km d’autonomie, soit un total de 400 km en WLTP.
Ces modèles Stellantis sont disponibles dans les réseaux spécialisés VUL de Citroën, Peugeot et Opel. Cependant, leur commercialisation passe par un contrat spécifique pour les flottes, à des tarifs qui ne sont pas publics. La production envisagée est de 5 000 unités en 2024, pour les trois marques, et de 10 000 en 2025. Enfin, Stellantis annonce qu’en 2024, une PAC plus puissante sera fabriquée pour les plus gros fourgons Citroën Jumper, Opel Movano et Peugeot Boxer.
Notons aussi que Ford vient de lancer au Royaume-Uni, là où cet E-Transit est fabriqué, une flotte expérimentale de six E-Transit équipés d’une PAC à hydrogène. Sous la houlette de Ford Pro, la division utilitaires du constructeur à Dagenham et Dunton dans l’Essex, une demi-douzaine d’entreprises et des opérateurs de flottes vont valider cette technologie FCEV jusqu’en 2025, date de la prise de décision pour une production en série.

L’E-Transit et l’eDaily en H2
Enfin, Iveco s’est allié à Hyundai pour développer une version pile à combustible FCEV de son récent eDaily électrique. Ce VU s’offre une PAC de 90 kW, pour alimenter une batterie de 35 kWh, qui fournit sa puissance électrique à un moteur de 140 kW/188 ch. Ce VU est astucieusement équipé de six réservoirs, soit un total de 12 kg d’hydrogène sous 700 bars, logés dans le châssis-échelle. L’autonomie atteint 350 km selon Iveco, auxquels s’ajoutent les 50 km d’autonomie de la batterie. Cet eDaily est actuellement en phase de test dans le Nord de l’Italie par le groupe de logistique Fercam ; il assure des livraisons dans le Trentin et le Tyrol du Sud, région équipée de la seule station d’hydrogène en Italie.
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