
Tous les grands constructeurs ont développé, à un moment ou un autre, un prototype de véhicule fonctionnant avec une pile à combustible (PAC) « nourrie » à l’hydrogène.
L’emballement technologique date de 2008 avec General Motors qui a dévoilé cette année-là son Opel HydroGen4. Un modèle emmené par un moteur électrique de 73 kW/100 ch, alimenté par une batterie de 93 kWh, elle-même rechargée par une PAC fonctionnant avec 4,2 kg d’hydrogène stocké sous 700 bars. L’autonomie affichée par cet HydroGen4 s’élevait alors à 320 km. Et notre essai de cet éphémère monospace soulignait la parfaite maîtrise technologique et la transparence de fonctionnement...
Tous les grands constructeurs ont développé, à un moment ou un autre, un prototype de véhicule fonctionnant avec une pile à combustible (PAC) « nourrie » à l’hydrogène.
L’emballement technologique date de 2008 avec General Motors qui a dévoilé cette année-là son Opel HydroGen4. Un modèle emmené par un moteur électrique de 73 kW/100 ch, alimenté par une batterie de 93 kWh, elle-même rechargée par une PAC fonctionnant avec 4,2 kg d’hydrogène stocké sous 700 bars. L’autonomie affichée par cet HydroGen4 s’élevait alors à 320 km. Et notre essai de cet éphémère monospace soulignait la parfaite maîtrise technologique et la transparence de fonctionnement de ce prototype développé en grande partie chez Opel en Allemagne.
De l’HydroGen4 au Scénic Z.E.V. H2
De son côté, Carlos Ghosn l’avait promis en 2006 dès son arrivée à la tête de Renault dans le Contrat 2009 : la marque au losange aurait son véhicule électrique à PAC carburant à l’hydrogène. En 2008, c’était chose faite avec deux prototypes de Renault Scénic Z.E.V. H2. Un résultat à partager avec Nissan : le constructeur japonais fournissait les plates-formes de son X-Trail FCV qui roulait au Japon depuis deux ans. Les caractéristiques étaient communes aux deux modèles : on retrouvait un moteur électrique de 90 kW, une batterie de 25 kWh, un réservoir d’hydrogène de 3,7 kg et une autonomie de 350 km, voire 500 km avec une pression du réservoir portée de 350 à 700 bars. Nissan avançait alors prudemment une commercialisation pour 2015 et Renault préférait ne pas s’engager. La crise financière de 2008 est passée par là et l’Alliance a mis au placard ses projets. Laissant à d’autres comme Symbio (ex Symbio FCell) le soin de mettre au point et de commercialiser des versions à PAC sur la base du Renault Kangoo Z.E. actuel et du Nissan eNV200 (voir ci-après).
En 2008 toujours, le Groupe PSA misait pour sa part sur son H2Origin, un petit utilitaire de livraison urbaine électrique. Un H2Origin doté d’une PAC de 10 kWh, offrant une autonomie de 300 km avec son hydrogène stocké à 700 bars. Peugeot et Citroën assuraient alors que la commercialisation en grande série était prévue pour 2020. Nous n’en sommes pas loin mais depuis, beaucoup d’H2O a coulé sous les ponts…
L’hydrogène et la pile à combustible
Composé d’un noyau et d’un seul électron, l’hydrogène est l’élément chimique le plus simple et le plus léger. À titre de comparaison, il est quatorze fois plus léger que l’air. Il gèle à – 259,14 °C et bout à – 252,87 °C. Dans une pile à combustible, hydrogène et oxygène sont rapprochés de part et d’autre d’une membrane polymère, l’électrolyte ; ils se combinent alors pour former de l’eau, le seul « rejet » de la voiture à hydrogène, en dégageant de l’énergie électrique et de la chaleur. C’est cette énergie électrique qui va alimenter le moteur électrique du véhicule.
Une histoire toujours recommencée
Plus récemment, il nous faut citer Volkswagen en 2014 avec sa Golf break HY Motion, annonce sans suite, ou encore Ford avec sa Focus FCV, restée lettre morte. En revanche, BMW a de la suite dans les idées avec ses prototypes i8 et 5 GT de 2015, équipés d’une PAC fournie par Toyota, en l’occurrence celle de la Mirai. Un accord de coopération renforcé en 2017 autour d’une R&D commune sur la PAC, et qui devrait aboutir à une production en petites séries d’un futur modèle à PAC à partir de 2022.
Enfin, Mercedes a fait rouler et essayer sa Classe B F-Cell basée sur la version électrique de la Classe B, toujours au catalogue mais sans PAC. Une Classe B F-Cell programmée pour… 2017. Cependant, Mercedes a présenté, lors du dernier salon de Francfort il y a quelques mois, la version dite « de série » du futur GLC F-Cell, avec une autonomie annoncée de 450 km (4 kg d’hydrogène embarqué à 700 bars de pression) et une PAC dont la puissance n’est toujours pas connue.

Plus récemment, on citera entre autres l’Audi A7 h-tron dévoilée en 2014 et qui emporte 5 kg d’hydrogène sous 700 bars de pression. Cela pour alimenter une PAC qui fournit au moteur une énergie restituée de 170 kW/228 ch pour 570 Nm. Une batterie lithium-ion de 8,8 kWh sert de « tampon » et peut se recharger sur le secteur. Autonomie annoncée pour cette Audi A7 h-tron : 550 km (NEDC), avec un plein effectué en 5 minutes, un 0 à 100 km/h atteint en 7,3 s et une vitesse maximale de 180 km/h. Aucun prix n’a pour l’instant été divulgué, en attendant une commercialisation prévue en 2020.

D’abord les flottes captives
L’hydrogène accumule les retards. Ce n’est pourtant pas la technologie qui est en cause, elle très bien maîtrisée. En effet, la pile à combustible n’est pas nouvelle et a peu évolué. Pour mémoire, les capsules spatiales Apollo s’en équipaient pour fournir leur propre énergie électrique à partir d’éthanol comme carburant. Mais c’est l’équilibre économique qui reste impossible à atteindre, pour la production comme pour la commercialisation d’un tel véhicule.
De fait, le réseau de distribution d’hydrogène, toujours embryonnaire malgré des efforts à souligner, ne peut ravitailler que des flottes bien identifiées : plus de 70 Hyundai ix35 FCEV ou Toyota Mirai d’ici fin 2018 pour les taxis Hype de la STEP (Société du taxi électrique parisien) en région parisienne. Ou encore celle d’Engie Cofely avec une cinquantaine de Kangoo Z.E. à PAC de Symbio dans son parc de Gennevilliers (92) en banlieue parisienne (voir notre article).
On soulignera donc le courage des quelques rares constructeurs qui ont franchi le pas de la production en (petites) séries. Ils se comptent sur les doigts d’une main ceux qui, en 2018 et d’ici 2020, avancent une commercialisation en Europe : Toyota et sa Mirai, Hyundai et son Nexo basé sur l’ix35 FCEV, et Kia avec le frère jumeau de ce dernier, puis Honda et sa Clarity Fuel Cell. Sans oublier Symbio avec ses Renault Kangoo Z.E. et Nissan e-NV200 transformés.
D’ailleurs, sur les quelque 6 500 véhicules à PAC commercialisés depuis la première Mirai en 2013 ‒ dont la moitié en Californie – pas moins des deux tiers sont des modèles de Toyota, suivi par Honda et Hyundai. En 2022, il faudra y ajouter BMW qui développe aujourd’hui son propre véhicule avec Toyota sur la base de la deuxième génération de la Mirai, avec un prix qui équivaudrait à celui d’une voiture hybride rechargeable selon le japonais. À cette date, Toyota annonce la production de 30 000 Mirai par an.
La Mirai, voiture du futur ?
Pour l’heure, Toyota vend sa Mirai – qui signifie « futur » en japonais – à des particuliers au Japon, aux États-Unis et dans sept pays du Nord de l’Europe. En France, pour un tarif de 78 900 euros TTC, elle concerne uniquement les entreprises, sur commande et avec une vingtaine d’unités commercialisées à ce jour et une soixantaine prévue d’ici fin 2018.
Cette Mirai s’équipe du Toyota Fuel Cell System. Ce TFCS combine les technologies de la PAC et de l’hybride et inclut la pile à combustible elle-même (Toyota FC Stack), ainsi que deux réservoirs d’hydrogène à haute pression. Soit 4,9 kg d’hydrogène stockés à 700 bars, une recharge en 4 minutes, avec à la clé une autonomie de 550 km NEDC (voir l’essai flash).
La PAC de Toyota revendique la meilleure densité/volume de puissance de la catégorie avec 3,1 kW/l, et développe une puissance maximale de 113 kW/155 ch. Le constructeur ajoute que le système d’humidification s’effectue par circulation interne et donc sans humidificateur, une première mondiale. Le moteur électrique « classique », en l’occurrence celui de la Prius, développe 113 kW/154 ch pour un couple de 335 Nm, ce qui assure une vitesse maximale de 175 km/h et un 0 à 100 km/h en 9,6 s.
Enfin, précisons que Toyota a fait le choix d’une petite batterie de stockage tampon de 1,6 kWh, qui a pour effet de plus solliciter la PAC pour fournir de l’énergie électrique en temps réel. Pour sa part, Hyundai a préféré une grosse batterie de 24 kWh. Celle-ci sert alors de stockage puis de source d’énergie pour aider le moteur électrique qui ne se suffit pas de l’électricité produite en temps réel par la PAC.
Ces deux philosophies démontrent à nouveau comment Toyota maîtrise déjà la puissance de sa PAC, capable de fournir seule, en continu et en temps réel, toute l’énergie nécessaire à son autonomie. Le japonais nous « refait » le coup de la Prius hybride il y a vingt ans !
Hyundai améliore encore sa PAC
Le Hyundai ix35 FCEV (Fuel Cell Electric Vehicle) comprend une PAC de 100 kW/136 ch qui alimente un moteur électrique de puissance identique, pour un couple de 305 Nm. À la différence de Toyota et comme nous venons de le souligner, la batterie lithium-ion affiche 24 kWh, une capacité équivalente à celles des Nissan Leaf et Renault Zoé de première génération. Les deux réservoirs d’hydrogène avancent une capacité de 144 l pour 5,64 kg, assurant une autonomie de 594 km NEDC, soit 500 km dans la réalité et encore moins l’hiver.
Si le poids d’environ 1,8 t de cet ix35 FCEV, équivalent à celui de la Mirai, n’est pas discriminant, la technologie de stockage tampon de l’électricité induit un moindre rendement. Et outre l’autonomie plus restreinte, les performances se font elles aussi plus limitées : 0 à 100 km/h en 12,5 s et une vitesse maximale de 160 km/h. Prix de vente : 66 000 euros TTC en France (voir l’essai flash).

Le Nexo en phase d’approche
Il faudra donc attendre la commercialisation en 2020 du Nexo, SUV révélé à Francfort par Hyundai l’an passé, pour découvrir la réalité d’une autonomie NEDC portée à 800 km grâce à un rendement de la PAC de 60 %, en hausse de 9 % par rapport à celui de l’ix35 FCEV, et développant alors 163 ch pour 402 Nm de couple. La batterie lithium-ion se fait elle aussi plus conséquente avec une puissance de 40 kW. Du coup, les performances s’alignent avec celles de la Mirai, soit un 0 à 100 km/h en 9,5 s.
Comme annoncé récemment, ce Nexo de Hyundai prêtera ses dessous et sa technologie à sa future cousine Kia à PAC révélée au prochain Mondial de Paris en septembre. Pour l’heure, le Nexo est commercialisé depuis la mi-mars en Corée à 52 000 euros TTC. Un tarif plutôt compétitif avant les aides de l’État.
Après un premier prototype développé à plusieurs exemplaires dès 2008, Honda a dévoilé au salon de Tokyo en 2015 la version définitive de sa FCX Clarity, rebaptisée Clarity Fuel Cell. Cette dernière se veut la concurrente la plus frontale de la Mirai : elle partage son encombrement (4,91 m de longueur) et, surtout, sa technologie de PAC assurant 103 kW/138 ch et entraînant un moteur électrique de 130 kW/174 ch et 300 Nm. Avec à la clé une autonomie de 650 km (NEDC) grâce aux 5 kg d’hydrogène embarqués dans deux réservoirs cumulant 141 l sous 700 bars. En revanche, la batterie de cette Clarity Fuel Cell est lithium-ion, plus compacte donc que celle de la Mirai, ce qui laisse assez de place pour emporter cinq personnes et non quatre. La vitesse maximale s’élève à 165 km/h et le 0 à 100 km/h se fait en 9 s.
Honda mise sur la Clarity

Pour l’heure, cette Clarity n’est diffusée en Europe qu’au Royaume-Uni et au Danemark dans une petite flotte pour le projet HyFIVE jusqu’en 2022. Elle sera ensuite commercialisée à une plus large échelle.
Entreprise hexagonale située dans l’Isère, Symbio a depuis longtemps tenté de concevoir des prototypes électriques dotés d’une PAC. En mai 2017, Symbio a d’ailleurs livré une cinquantaine de Renault Kangoo Z.E. H2 à Engie Cofely, et cinq au conseil départemental de La Manche en janvier dernier.
Ces Kangoo Z.E. H2 « de série » se dotent d’une PAC à hydrogène de 5 kW, jouant le rôle de prolongateur d’autonomie (300 km au lieu de 150 km). En effet, le moteur électrique de 44 kW/60 ch n’est pas alimenté par la PAC mais toujours par la batterie lithium-ion de série (22 kWh). Cette dernière est rechargée par l’électricité fournie par cette petite PAC, avec un réservoir d’hydrogène de 76 l/1,8 kg à 350 bars, pour une recharge en 6 minutes.

Actuellement, la transformation du Kangoo Z.E en H2 est facturée 27 000 euros TTC. Mais Symbio assure que ce prix baissera progressivement avec le nombre d’unités produites, allant jusqu’à avancer le chiffre de 7 000 euros au seuil de 10 000 modèles
fabriqués.
Symbio en pionnier
Et Symbio ne compte pas s’arrêter là. En 2017 dans le cadre du salon FC Expo de Tokyo, l’entreprise a mis en avant un Nissan eNV200 toujours basé sur le principe de PAC fournissant la batterie en électricité. Dans ce cas, le réservoir d’hydrogène se fait plus important (3,8 kg) et autorise une recharge portant alors à 500 km l’autonomie de l’eNV200.
L’offre de véhicules particuliers ou de petits utilitaires fonctionnant avec une PAC à hydrogène demeure encore très restreinte, alors que le prix et la recharge restent des freins bien plus importants que pour les poids lourds et autobus. Les constructeurs n’étant pas philanthropes, ils attendent soit des subventions pour l’achat de leurs véhicules, soit un réseau de distribution d’hydrogène public hors des flottes captives. Le message est passé.
Dossier - Véhicules hydrogène : la longue marche des constructeurs
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