
« Certains jeunes collaborateurs, notamment en zone urbaine, ne souhaitent pas bénéficier d’un véhicule. Ils ne fonctionnement pas comme leurs aînés avec la mobilité : ils privilégient les transports en commun, le vélo ou d’autres mobilités alternatives. En tant qu’entreprise, nous devons nous adapter et proposer des mobilités partagées », souligne d’emblée Céline Colin, responsable du pôle véhicules au sein du Groupe Legendre. Ce spécialiste du BTP a commencé par équiper son siège rennais de véhicules en pool, avant de passer à l’autopartage, il y a un peu plus de deux ans. Désormais, sept véhicules sont partagés, dont deux électriques, dans...
« Certains jeunes collaborateurs, notamment en zone urbaine, ne souhaitent pas bénéficier d’un véhicule. Ils ne fonctionnement pas comme leurs aînés avec la mobilité : ils privilégient les transports en commun, le vélo ou d’autres mobilités alternatives. En tant qu’entreprise, nous devons nous adapter et proposer des mobilités partagées », souligne d’emblée Céline Colin, responsable du pôle véhicules au sein du Groupe Legendre. Ce spécialiste du BTP a commencé par équiper son siège rennais de véhicules en pool, avant de passer à l’autopartage, il y a un peu plus de deux ans. Désormais, sept véhicules sont partagés, dont deux électriques, dans trois sites. Et cela fonctionne bien : « Nous atteignons un taux d’utilisation de 49 % les jours ouvrés », complète Céline Colin.
L’autopartage redécolle
Car si l’autopartage a connu un creux avec la crise sanitaire et l’amplification du télétravail, « le marché a repris depuis un peu plus de six mois. Et le dynamisme est même supérieur à ce qu’il était avant la pandémie », rappelle Stéphane Savouré, directeur général d’OpenFleet. Selon ce prestataire, 10 à 25 % des entreprises et 50 % des collectivités pourraient être candidates à l’autopartage.
De son côté, Optimum Automotive, qui gère environ 5 000 véhicules partagés, vient de remporter trois appels d’offres, pour 500 véhicules au total, chez Carsat Hauts-de-France, et les bailleurs Pas-de-Calais Habitat et Plurial Novilia. « Le nombre de flottes partagées augmente, tout comme celui des véhicules dans chaque parc », note Laurent Geronimi, directeur commercial grands comptes de ce prestataire.
Des enjeux économiques et de RSE
« Les entreprises recherchent des économies d’échelle alors que les déplacements représentent leur deuxième ou troisième poste de dépenses. De fait, l’autopartage réduit le nombre de véhicules et le TCO global de la flotte. Ensuite, il y a des enjeux climatiques. Nos clients veulent décarboner leur parc. Ce qui passe par des véhicules plus verts, des plans de mobilité, du covoiturage pour les trajets domicile-travail et de l’autopartage », énumère Alexandra Caubet, directrice générale de Glide.io, filiale de Mobilize (Renault Group), qui gère 6 700 véhicules partagés dans onze pays, dont 1 700 en France.
Pour le groupe Orange, Alexandre Nepveu, chargé de projets mobilités, ne dit pas autre chose : « L’autopartage répond à plusieurs objectifs : mettre à disposition du plus grand nombre de salariés les véhicules, tout en optimisant la flotte et en baissant les émissions de CO2, dans le cadre de notre objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2030. » Orange s’appuie sur un parc partagé de 3 553 véhicules dont 852 sont électrifiés.
Respecter la LOM
« Pour une collectivité astreinte par la loi d’orientation des mobilités (LOM) à intégrer un pourcentage de véhicules à faibles émissions (VFE, les émissions à l’échappement ne dépassent pas 50 g de CO2/km) lors des renouvellements et à respecter le décret sur le Schéma de promotion de l’achat socialement et écologiquement responsable (SPASER), l’autopartage est un atout : il permet de se conformer à la législation, tout en restant au plus près des besoins, et concourt donc à décarboner la flotte », observe Cédric Le Floch, directeur des achats publics du département du Calvados qui déploie un parc partagé de 160 véhicules.
La montée en puissance des zones à faibles émissions-mobilité (ZFE-m) constitue aussi un accélérateur et l’autopartage électrique peut alors s’utiliser pour le dernier kilomètre. Ainsi, l’opérateur Clem’ propose, aux artisans et professionnels à Paris et en Île-de-France, un parc de 120 VUL électriques (sur 54 anciennes stations Autolib’), avec l’objectif de porter ce chiffre à 200.
Accroître le taux d’utilisation
« Avec l’autopartage, on peut réduire la taille de la flotte de 20 à 30 %, et donc les coûts, car on accroît le taux d’utilisation des véhicules », avance Alexandre Fournier, directeur marketing et communication du prestataire Mobility Tech Green qui gère 8 000 véhicules et vélos en autopartage (90 %/10 %) « Nos meilleurs clients atteignent les 65 %. C’est le palier supérieur car il faut se garder une marge pour éviter les tensions », indique Stéphane Savouré pour OpenFleet. « Grâce en partie à l’autopartage, nous diminuons chaque année la taille du parc de 5 % environ. Un véhicule partagé remplace en effet deux à trois véhicules et sur certains sites, nous atteignons des taux d’utilisation de l’ordre de 70 % », confirme Alexandre Nepveu pour le groupe Orange.
Pour Glide.io, Alexandra Caubet constate des taux moyens d’utilisation « entre 25 et 40 % sur les horaires de travail en jours ouvrés, et jusqu’à 70 % dans certaines entreprises. Autre gain : l’autopartage se substitue en partie aux indemnités kilométriques, aux taxis, voire à la location courte durée », ajoute-t-elle. « Enfin, comme la solution est automatisée, nos clients limitent aussi le temps passé à gérer la flotte », précise Stéphane Savouré pour OpenFleet.
Une meilleure traçabilité
Autre apport d’un outil d’autopartage : il peut remonter des données, sur les kilométrages et les usages, site par site. Ce qui aide à repérer les véhicules plus ou moins employés, et donc à ajuster la flotte au plus juste. « Passer des pools à l’autopartage a offert une meilleure traçabilité. Nous savons qui a emprunté le véhicule, pour quel trajet et pour combien de kilomètres. Nous pouvons alors réfléchir à une meilleure répartition entre sites. Nous procédons donc à des ajustements, mais sans forcément réduire le parc déjà en partie optimisé en 2014-2015 avec la mutualisation en pools », explique Sandrine Lauraire, gestionnaire du parc du département de l’Essonne, à la tête de 175 véhicules partagés. Autre bénéfice de cette traçabilité : « Il y a un petit recul de la sinistralité car nous savons dorénavant qui conduit sur une tranche horaire. Avant, les dommages n’étaient pas toujours déclarés. Nous notons aussi un léger recul de la consommation de carburant et les collaborateurs oublient moins souvent de remplir le réservoir pour le suivant quand il est à moitié vide », poursuit Sandrine Lauraire.
Mieux cadrer les usages
« Nos clients passent souvent par plusieurs étapes. Ils commencent avec une solution de remise des clés à l’accueil ou de boîtes à clefs, avant de passer au boîtier avec déverrouillage du véhicule par smartphone ou par badge, reprend Laurent Geronimi pour Optimum Automotive. Les remontées de données aident alors à mieux cadrer les usages, à attribuer le véhicule le plus adapté, voire un vélo à assistance électrique pour un trajet très court. Au final, cela accroît le taux d’utilisation, avec des véhicules disponibles au-delà des horaires d’ouverture de l’accueil. De plus, cela évite les carnets de bord pas toujours remplis », complète Laurent Geronimi. Qui accompagne les clients qui désirent conserver leurs boîtes à clefs en ajoutant une box pour remonter les données.
« Cette meilleure connaissance des usages favorise aussi l’électrification car on connaît le nombre de véhicules éligibles. Selon les déplacements, on sait où il est judicieux d’installer des bornes et combien, si plusieurs sites sont équipés. Nous pouvons aussi mener un audit et une expérimentation avant de lancer la solution », détaille Laurent Geronimi.
Autopartage et électrique : le duo gagnant
« L’autopartage a encore plus de sens s’il est électrique. D’autant que les distances parcourues en véhicule partagé sont quasiment toujours compatibles avec l’autonomie du véhicule électrique : le kilométrage moyen est le plus souvent compris entre 60 et 80 km par réservation », note Alexandra Caubet pour Glide.io. « L’autopartage contribue à mieux rentabiliser l’électrique car le véhicule roule plus, à la différence d’un véhicule attitré employé en moyenne 5 % du temps », complète Alexandre Fournier pour Mobility Tech Green. « En outre, souligne Stéphane Savouré pour OpenFleet, l’état de charge du véhicule s’affiche dans l’application ou sur le site qui répartit les véhicules et en alloue un autre si celui prévu n’est pas assez chargé. Ce qui est impossible avec un pool géré à l’ancienne. »
Pour Céline Colin du Groupe Legendre, l’autopartage accélère l’électrification : « Les collaborateurs peuvent ainsi découvrir cette motorisation, même s’il reste encore quelques freins. Nous voulons aussi développer une marque employeur positive et cela y contribue. » Céline Colin espère ainsi être plus rapidement dans les clous de la LOM qui impose un quota de 10 % de véhicules à faibles émissions lors des renouvellements.

Tester l’électrique
Sur ce sujet de l’électrification, le groupe Orange a pris une large avance. Son parc partagé comprend 3 553 véhicules, pour 24 000 abonnés au service géré par Mobility Tech Green ; sur ce total, 852 véhicules sont électrifiés dont 300 électriques à 100 %. « Dès le lancement, ce service a intégré plus d’électriques et d’hybrides rechargeables que le reste de la flotte, rappelle Alexandre Nepveu. Et depuis fin 2022, le catalogue pour les véhicules partagés est 100 % électrique. Et comme les renouvellements portent uniquement sur du 100 % électrique, dès 2026, il ne devrait rester que quelques thermiques ou hybrides réservés aux longs trajets. L’autopartage électrique a plusieurs vertus dont celle de permettre aux salariés de s’habituer à cette motorisation : c’est un bon outil pour la tester et la démocratiser », conclut Alexandre Nepveu.
Enfin, l’autopartage connaît une autre évolution : de plus en plus d’entreprises ouvrent l’autopartage aux collaborateurs pour des usages privés le soir et le week-end, à des tarifs attractifs. « Cela contribue à rentabiliser la solution, avec un impact en termes de développement durable car des collaborateurs abandonnent le second véhicule de la famille, voire le premier. Au final, ils vont rouler moins et faire plus appel aux mobilités douces. C’est un cercle vertueux », estime Stéphane Savouré.
Ouvrir l’autopartage…
Chez Orange, 36 % des véhicules peuvent s’emprunter à titre privé. « Cela dépend des sites car les parkings ne sont pas tous accessibles le week-end, ce qui reste un frein. Dans certains sites, les collaborateurs peuvent aussi louer des VUL pour un déménagement. Les tarifs sont très abordables : 30 euros le week-end pour un modèle électrique, et 60 euros pour un thermique, avec 300 km, essence et péage inclus car les salariés ont une carte carburant dans le véhicule », décrit Alexandre Nepveu.
« Chez Metro France, l’ouverture de la solution à un usage privé en soirée et en week-end contribue à rendre l’autopartage rentable, tout en offrant une solution de mobilité à l’ensemble des collaborateurs du siège et de la halle voisine (un entrepôt) », précise Mélaine Pouchain responsable CARE de ce grossiste en produits alimentaires et en équipements. Chez Metro, l’offre d’autopartage comprend neuf véhicules. C’est notamment pratique pour ceux qui disposent d’un véhicule de service deux places et peuvent profiter de cette solution pour emmener la famille en week-end, sans avoir à acquérir un véhicule personnel.
… aux usages privés
Des collectivités commencent aussi à ouvrir leur solution d’autopartage aux agents pour un usage privé, comme le département de l’Essonne. « Les agents pourront alors emprunter un véhicule électrique le week-end ou en soirée, ou un VUL pour un déménagement, à un tarif très abordable : 15 euros pour une soirée ou 30 euros pour un week-end. Nous sommes en région parisienne et tous les agents n’ont pas de voiture personnelle. Ils pourront aussi disposer d’un véhicule quand leur propre voiture est au garage. Et c’est une façon de rentabiliser la solution », avance Sandrine Lauraire.
Une ouverture à laquelle réfléchissent des communes pour offrir à leurs habitants d’emprunter leurs véhicules partagés aux heures creuses, indique à ce propos Alexandre Fournier pour Mobility Tech Green.
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