
Chaque année, entre 120 000 et 130 000 véhicules sont volés en France, toutes gammes confondues. Un chiffre « stable », selon Anthony Tudal, mais élevé car il représente 20 % des vols de voitures dans l’espace Schengen. « Ce qui s’explique par la taille du parc français mais aussi par l’importance du réseau frontalier pour faire partir les véhicules par route ou par mer. Environ 50 % des véhicules ne sont pas retrouvés et la plupart des autres ne sont pas toujours en bon état », poursuit Anthony Tudal, directeur commercial chez Vodafone Automotive, spécialiste des systèmes électroniques de protection et des solutions de traquage pour les...
Chaque année, entre 120 000 et 130 000 véhicules sont volés en France, toutes gammes confondues. Un chiffre « stable », selon Anthony Tudal, mais élevé car il représente 20 % des vols de voitures dans l’espace Schengen. « Ce qui s’explique par la taille du parc français mais aussi par l’importance du réseau frontalier pour faire partir les véhicules par route ou par mer. Environ 50 % des véhicules ne sont pas retrouvés et la plupart des autres ne sont pas toujours en bon état », poursuit Anthony Tudal, directeur commercial chez Vodafone Automotive, spécialiste des systèmes électroniques de protection et des solutions de traquage pour les véhicules.
Ces chiffres montreraient une stabilité, voire un léger reflux, probablement lié au fait que « les constructeurs améliorent toujours les technologies antivol », justifie Louis-Bénigne Thomas, responsable du service assurance automobile du loueur Arval. Ils auraient au contraire légèrement augmenté pour Daniel Claret, directeur du service flottes automobiles du conseil en assurances Bessé qui intègre dans ses statistiques les tentatives de vol et les vols commis sur les effets à l’intérieur des véhicules (60 % du total).
Les véhicules des flottes plus désirables
Par rapport aux particuliers, les flottes sont-elles plus ou moins touchées par le vol ? « D’après les chiffres, il n’y aurait pas de différences notables entre les véhicules de flotte et les autres. Au sein du parc d’Arval, nous enregistrons environ 2,5 à 3 vols pour 1 000 véhicules », répond Louis-Bénigne Thomas. « Les véhicules des flottes automobiles pourraient avoir tendance à être plus visés car ils sont récents », estime pour sa part Xavier Boulanger, fondateur et gérant du télématicien Sud Télématique. « Nos véhicules, reprend Louis-Bénigne Thomas, ont certes une typologie spécifique. Ils sont âgés de deux ans en moyenne contre près de huit ans pour l’ensemble du parc roulant. Donc potentiellement plus visés. Mais a contrario, plus un véhicule est récent, plus il est équipé et plus il est difficile à voler. »
Quoi qu’il en soit, les vols concernent tous les types de véhicules à partir du moment où « ils sont désirés sur le marché », affirme pour sa part Olivier David, directeur commercial France de Coyote, un prestataire qui propose de l’aide à la conduite en temps réel, de la récupération de véhicules volés et de la gestion de flotte. Pour Anthony Tudal de Vodafone Automotive, cela explique que « les SUV soient un peu plus souvent ciblés. A contrario, les véhicules diesel qui se revendent désormais moins bien commencent à être moins visés. Mais les voleurs et trafiquants se mettent à s’intéresser aux modèles hybrides, voire électriques. »
Louis-Bénigne Thomas rappelle quelques exemples comme une filière qui s’était attaqué aux Range Rover il y a deux ans, en raison de failles dans le système de sécurité. « Mais les constructeurs les ont corrigées depuis », ajoute-t-il.

Des véhicules pour les pièces détachées
« Certains véhicules, surtout parmi les grandes marques généralistes, peuvent aussi être volés avant d’être désossés pour la revente de pièces détachées, avance Olivier David, alors que les modèles premium partent directement à la revente. » Dans les flottes en LLD, cette dernière situation prédomine. « Les véhicules sont quasiment neufs et possèdent une valeur financière. En cas de vol, quand nous les retrouvons, ils sont le plus souvent entiers car les trafiquants cherchent à les revendre plutôt qu’à récupérer les pièces », souligne Louis-Bénigne Thomas.
Les utilitaires, surtout quand ils disposent d’équipements spécifiques, sont pareillement visés : « Les voleurs s’intéressent soit aux équipements eux-mêmes, soit au véhicule dans son ensemble, soit aux pièces détachées. Cela alimente un trafic à destination de marchés professionnels à l’étranger. Les utilitaires équipés de nacelles ou de bennes sont les plus prisés », poursuit Olivier David pour Coyote France. « Entre autres à destination des pays de l’Est », précise son confrère Anthony Tudal pour Vodafone Automotive. « Avec des équipements nombreux ou onéreux, les assureurs réclament d’ailleurs souvent la mise en place d’alarmes, de serrures renforcées supplémentaires ou d’un système de traquage », complète Olivier David.
Il est difficile de mettre en avant des modèles précis qui tenteraient plus les voleurs : les Clio sont certes les véhicules les plus volés mais ce constat est aussi lié à un effet volume car ce modèle est très courant. En revanche, les chiffres montrent une forte progression des risques dans des régions comme l’Île-de-France et PACA.
Des usages et des départements à risque
« 20 % des vols sont concentrés sur trois départements : les Bouches-du-Rhône, Paris intra-muros et le Nord, probablement en raison de la proximité avec la Belgique », détaille Louis-Bénigne Thomas. Et avec onze départements, c’est-à-dire en ajoutant notamment les départements franciliens, « ce chiffre monte à 50 % ». Un phénomène relevé par Pascale Poissonnet, responsable des services généraux et de la flotte d’une entreprise de BTP. Et cette dernière note aussi une forte croissance du nombre des bris de glace : environ une quinzaine en 2018 et une dizaine depuis le début de 2019. « Cela reste surtout lié à des chantiers en région parisienne et visiblement pour s’attaquer aux objets laissés dans le véhicule », remarque-t-elle.
Pour Louis-Bénigne Thomas, les risques peuvent aussi varier en fonction des usages : « Avec le développement des nouvelles mobilités, nous avons des clients qui commercialisent ce type de services auprès de leurs propres clients et donc sous-louent les véhicules. Le profil de risque peut alors être plus important », constate-t-il.
Et depuis plusieurs années, les modes opératoires changent. Le « car jacking », c’est-à-dire le vol du véhicule à l’arrêt par violence ou ruse en délogeant le conducteur, et le « home jacking », soit le cambriolage du domicile pour récupérer les clefs de la voiture, ont été courants dans les années 1990 et 2000.
Le « mouse jacking » prépondérant
« Depuis, le vol électronique ou “mouse jacking” est venu supplanter les anciens modes opératoires, explique Anthony Tudal pour Vodafone Automotive. Le voleur, positionné à faible distance, peut employer un brouilleur qui empêche le verrouillage du véhicule avec la clef électronique. Le conducteur pense alors avoir fermé son véhicule mais celui-ci reste ouvert. Et le voleur le démarre alors avec un autre accessoire en se branchant sur la prise diagnostic OBD. »
Ces vols « à la souris » représentent désormais « 66 % des vols », estime Olivier David pour Coyote France. Anthony Tudal souligne de son côté que « huit véhicules sur dix retrouvés ne montrent pas de signes d’effraction. » « Avantage, confirme Olivier David, le véhicule reste intact. Il n’y a pas de serrures forcées, de vitres brisées. Il est donc en parfait état de marche. » À condition bien sûr qu’il soit récupéré rapidement et pas encore désossé !
Cependant, l’absence d’effraction a entraîné de nombreux litiges avec les assureurs. Mais la jurisprudence (CA Paris 22 septembre 2015, n° 14/14596) joue dorénavant en faveur des assurés. Dans ce cas jugé par la cour d’appel de Paris, le conducteur détenait en effet les deux clefs du véhicule volé… « Mais en l’absence de signes d’effraction, les propriétaires ont parfois encore du mal à se faire rembourser », note Olivier David.
« Les assureurs n’ont pas encore vraiment adapté leurs contrats et les experts ne sont pas tous formés pour détecter l’existence d’une ouverture frauduleuse en analysant les données du véhicule. La situation va évoluer mais il reste pour l’instant difficile de trouver des éléments de preuve. Nous avons eu récemment un client qui s’est fait voler le contenu de son véhicule sans aucune trace d’effraction. A-t-il laissé sa voiture ouverte ou est-ce une effraction électronique ? », s’interroge Daniel Claret pour le conseil en assurances Bessé (à ce sujet, voir l’article « Assurance et vols de véhicules ‒ De l’effraction physique à l’effraction électronique » dans Flottes Automobiles n° 242).
Le vol a un coût dans les flottes
Quoi qu’il en soit, le vol peut avoir des conséquences très néfastes pour les clients professionnels. « Selon la franchise, l’impact financier peut être lourd. Et le temps de latence est souvent assez long en cas d’indemnisation. Et à moins qu’il ne s’agisse d’une Clio blanche, d’un véhicule lambda remplaçable rapidement, le vol a une implication négative sur l’activité et la productivité de l’entreprise », rappelle Olivier David.
« Nous avons subi deux de vols de VP, des Peugeot 2008, il y a deux ans et aucun l’an dernier, sur une flotte de 260 véhicules, moitié VP, moitié VU. Pour nous, c’est une perte sèche car le groupe a fait le choix de s’auto-assurer. Sur ces deux vols, les véhicules n’ont pas été retrouvés et nous avons dû rembourser le loueur à la hauteur de la valeur financière », illustre Pascale Poissonnet, responsable de la flotte d’une entreprise de BTP.
D’où l’intérêt de retrouver rapidement le véhicule. Pour faciliter la récupération, des techniques d’alarme mais aussi de localisation par GPS ou ondes radio ont le vent en poupe. Arval mise ainsi sur la géolocalisation des véhicules avec 10 % de sa flotte équipée en boîtiers de télématique. Et si le client du loueur n’a pas opté pour une prestation de géolocalisation et a juste choisi le boîtier pour obtenir des données liées au kilométrage, au carburant ou à l’éco-conduite, il est possible d’actionner le dispositif lors d’un vol.
Retrouver rapidement le véhicule
« Mais pour des raisons de protection des données personnelles des conducteurs, cette démarche est lancée uniquement quand une plainte a été déposée. Notre intérêt et celui du client, c’est de retrouver le plus vite possible le véhicule pour éviter des pertes d’activité mais aussi du fait des enjeux financiers, car une indemnisation entraîne aussi une hausse potentielle des cotisations », précise Louis-Bénigne Thomas pour Arval.
Vodafone Automotive propose un système d’alarme et de GPS pour localiser le véhicule. Cette fonctionnalité vient en sus des usages habituels du GPS comme l’optimisation des tournées, la remontée de données pour gérer les kilométrages, les entretiens ou les prises de carburant, ou encore à des fins d’éco-conduite. Vodafone Automotive compte 60 000 clients actifs en France et 18 millions de véhicules connectés de par le monde.
« L’alarme contribue à dissuader le voleur et à protéger le contenu du véhicule. Et nos solutions de géolocalisation disposent d’une technologie permettant, si le voleur recourt à un brouilleur, de remonter une alerte à nos 45 centres de télésurveillance et d’assistance en Europe. Nos équipes contactent alors le client pour lever le doute », décrit Anthony Tudal pour Vodafone Automotive.
Immobiliser le véhicule volé
Point fort de son système selon Vodafone : « Nous pouvons ensuite procéder à une immobilisation à distance du véhicule volé. Une fois que celui-ci est arrêté et le moteur éteint, il ne pourra pas redémarrer. Il suffit ensuite de le localiser et de le récupérer. Si le véhicule est dans un lieu fermé comme un box, nous avons la dernière localisation avant la perte du signal. Mais dans de nombreux parkings, la localisation par GPS fonctionne sur plusieurs sous-sols. Nous pouvons aussi actionner à distance les feux de détresse ou le klaxon pour identifier le bon box », expose Anthony Tudal. En indiquant que neuf véhicules sur dix équipés par Vodafone sont retrouvés. Et pour récupérer le véhicule, l’importance du réseau international est mise en avant comme un atout : « Nous pouvons suivre la voiture si elle passe à l’étranger. Nous sommes allés récupérer récemment un véhicule en Mauritanie », complète Anthony Tudal.
Sud Télématique fait pareillement appel des boîtiers dotés d’un GPS. « Nous sommes alertés dès lors qu’il y a un brouillage du GPS, une balise qui n’émet plus ou un déplacement anormal. Il peut par exemple s’agir d’un véhicule qui sort de sa zone de parking. Par la suite, une commande immobilise le véhicule à distance, explique Xavier Boulanger pour le télématicien. Nous avons ainsi retrouvé un véhicule qui était remorqué. Un déplacement contact éteint, c’est une alerte », souligne-t-il.
L’art de la dissimulation
Sud Télématique équipe un nombre croissant de motos avec « un boîtier qui ressemble à s’y méprendre à un boîtier de clignotants, ce qui évite qu’ils soient repérés. Nous avons aussi récemment équipé des véhicules de luxe : des Austin Martin, des Mustang, des Bentley, énumère Xavier Boulanger. Les assureurs, avec ce type de modèles, demandent un outil de traquage. Nous pouvons également doter de puces des éléments non motorisés dont certains valent très cher. Nous avons équipé récemment des valises de géomètre en dissimulant une puce dans la mousse de protection. »
Coyote privilégie le traquage par ondes radios : « Lorsqu’un véhicule entre dans un parking ou qu’il est transporté dans un container, on peut perdre le signal GPS. En outre, les boîtiers GPS, souvent installés au même emplacement dans un véhicule, sont faciles à localiser et à arracher. Nous vendons donc une solution différente : un boîtier autonome qui n’est pas branché sur le véhicule et peut se dissimuler plus facilement. Le véhicule est détecté par ondes radios même lorsqu’il est enfoui dans un sous-sol ou mis dans un container. Les ondes passent la barrière du béton et des cages métalliques. Elles résistent aussi mieux au brouillage », avance Olivier David. Ce qui nécessite, si le client désire la géolocalisation, d’équiper le véhicule de deux boîtiers différents.
Éviter l’arrachage du boîtier
« Les véhicules sont retrouvés à 90 % en moins de 24 heures », ajoute Olivier David pour Coyote qui vient de passer le cap des 100 000 véhicules équipés sur le réseau sigfox. « Nos principaux clients travaillent dans les secteurs du BTP, de l’énergie, de l’eau, etc. Les administrations publiques et les collectivités territoriales y viennent pareillement car les spécificités de leurs couvertures d’assurance font qu’un vol de véhicule se traduit souvent par une perte sèche », poursuit le responsable.
Mais désormais, les voleurs savent aussi que des véhicules peuvent être équipés. « Ils peuvent détecter le boîtier. L’essentiel, c’est donc d’éviter qu’ils le trouvent rapidement pour l’arracher. Au bout de quelques minutes, ils ont tendance soit à abandonner le véhicule, soit à prendre le risque de le voler mais nous pouvons alors le localiser, souligne Olivier David. D’où la nécessité de dissimuler efficacement le boîtier. Il nous arrive de démonter les sièges, le coffre, etc. Dans le doute, les voleurs ont donc de plus en plus tendance “à sécher” le véhicule. C’est-à-dire à le laisser quelques jours au même endroit pour s’assurer de l’absence de système de localisation et de traqueur », reprend le représentant de Coyote.
Certes, ces équipements n’empêchent pas le vol : « Les véhicules n’ont pas d’autocollant indiquant qu’ils sont dotés d’un traqueur. Tout se fait dans la discrétion afin que le voleur n’ait pas comme premier réflexe de rechercher le boîtier », conclut Olivier David.
Et face au vol d’un véhicule, il faut faire vite. « Plus le conducteur met du temps avant de nous avertir, plus le voleur a le temps de déjouer les systèmes d’alerte et de localisation », rappelle Anthony Tudal pour Vodafone. « Et plus le temps passe, plus le propriétaire ou le locataire, en cas de LLD, risque de retrouver un véhicule désossé. Plus on agit vite, plus on a donc de chances de récupérer le véhicule entier. La vitesse et la réactivité constituent souvent la clef du succès », confirme Olivier David pour Coyote.
Avant tout, agir rapidement
Parmi les problèmes rencontrés : le vol du véhicule au domicile alors que le conducteur est en vacances. Celui-ci ne s’aperçoit alors du vol que quelques jours ou semaines plus tard, entraînant une forte baisse de la probabilité de retrouver le véhicule. « Nous avons créé à cet effet plusieurs applications, indique Anthony Tudal. Avec l’une, le conducteur peut se connecter régulièrement pour localiser le véhicule et vérifier qu’il n’a pas bougé. L’autre alerte si le véhicule sort d’une zone déterminée autour du domicile. » Bienvenue dans le monde connecté.
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